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Les traditions chamaniques amazoniennes sont profondément enracinées dans les cultures autochtones de la région amazonienne en Amérique du Sud. Ces traditions varient considérablement d’une communauté à l’autre en raison de la diversité culturelle des peuples indigènes de la région. Elles sont également soumises au « style » de la transmission faite par le chaman et sa lignée. Cependant, certaines caractéristiques et pratiques communes peuvent être identifiées. Voici quelques éléments généraux des traditions chamaniques amazoniennes :

Plantes de diète : Les plantes jouent un rôle central dans les pratiques chamaniques amazoniennes. Les Occidentaux entendent souvent parler des plantes psychoactives, telles que l’ayahuasca, pour induire des états modifiés de conscience, explorer le monde spirituel, et faciliter la guérison. Mais il faut savoir que les Curanderos, Paje, Maestros (selon différents termes pour les nommer) utilisent de nombreuses autres plantes, dites de diète, qui ne sont généralement pas psychoactives. Dans les faits ce sont ces plantes qui permettent véritablement au chaman d’opérer des guérisons. Je développe cet aspect un peu plus bas.

Communication avec les esprits, des rituels et cérémonies : Les chamans amazoniens vivent dans un monde spirituel peuplé d’esprits, d’ancêtres, et d’entités surnaturelles. Ils agissent en tant qu’intermédiaires entre le monde physique et spirituel, utilisant des rituels, des chants, et des danses pour établir des connexions avec ces forces invisibles. Les rituels visent à établir une connexion avec les esprits, à recevoir des enseignements, à obtenir des visions, et à favoriser la guérison. Les chamans sont avant tout les gardiens d’un équilibre entre la tribu et ses membres et la Nature dans ses aspects autant physiques que spirituels.

Guérison holistique : Les chamans amazoniens sont souvent consultés pour des problèmes de santé physique, mentale, et spirituelle. Ils utilisent un mélange de plantes médicinales, de rituels de guérison, de chants, et d’autres techniques pour restaurer l’équilibre et la santé. Très souvent la première fonction des plantes est tout simplement une purge. Ils ne séquencent pas comme nous les différents aspects de la réalité (physique, psychique, spirituel) et fonctionnent essentiellement en mode « cerveau droit », dans un univers intuitif, perceptif et organique. Une purge du corps revient donc à travailler sur tous les aspects simultanément.

Initiation et formation : Devenir chaman dans les traditions amazoniennes implique souvent une initiation spirituelle rigoureuse et très longue, avec des privations physiques importantes. N’importe qui ne peut pas l’être. Des compétences ou capacités spécifiques sont requises et doivent être reconnues par d’autres chamans. Les apprentis suivent des périodes d’isolement, participent à des diètes drastiques de plantes, et doivent recevoir les enseignements directement des esprits, validés par d’autres chamans expérimentés.

Divination : Les chamans amazoniens pratiquent souvent la divination pour obtenir des informations sur l’avenir, résoudre des problèmes, ou conseiller la communauté. Les méthodes de divination peuvent inclure la lecture de feuilles de coca, le lancer de coquillages, et d’autres pratiques spécifiques à chaque culture.

Art et symbolisme : Les traditions chamaniques amazoniennes sont souvent expressives à travers l’art et le symbolisme. Les chamans créent des peintures, des sculptures, des tissus et d’autres formes artistiques pour représenter leurs expériences spirituelles et les enseignements qu’ils reçoivent.

♦♦♦ Il est crucial de noter que ces pratiques sont profondément liées à la culture spécifique de chaque communauté indigène. Le respect de ces traditions et la compréhension de leur contexte culturel sont essentiels lors de l’exploration ou de la participation à des pratiques chamaniques amazoniennes. Les chaman de ces peuples manquent par exemple cruellement de compréhension, voire simplement de conception, des problématiques occidentales courantes, tels que la surmentalisation, la perte de sens dans sa vie, la recherche d’un but/d’une mission, vouloir connecter le divin. D’énormes malentendus peuvent survenir entre les attentes des uns et l’inexistence de ces concepts chez les autres. Une adaptation des ces pratiques ou un encadrement par une personne pouvant établir le lien ou « traduire » est d’une importance capitale. Lire ici le témoignage d’un de mes enseignants, Mateo Arevalo, sur son expérience avec ces « fous d’occidentaux » : https://kahpi.net/becoming-ayahuasca-master-takes-courage-endurance-respect/)♦♦♦

Kajuyali Tsamani

Mon tout premier contact avec la Médecine amazonienne s’est faite grâce à Merlin, un ayahuasquero suisse dès 2003. Nous nous sommes rendus la même année en Belgique pour ma première initiation avec Kajuyali Tsamani un guérisseur colombien de l’ethnie Panche. A cette occasion, j’ai vécu ma première métamorphose – en jaguar, très impressionnant ! J’ai également communiqué avec des morts, rencontré physiquement une guide spirituelle et reçu l’enseignement de la shaking medecine pour libérer les énergies. C’est là que la Médecine m’a annoncé qu’elle allait m’apprendre à guérir les gens, comme elle le faisait elle-même. S’en est suivi une dizaine d’années de pratiques de nettoyage et guérison pour moi-même. J’ai été également guidée vers des formations m’apprenant à poser le cadre des relations thérapeutiques, la prise en charge des patients et la communication.

Mateo Arevalo

En 2013, j’ai été initiée par Mateo Arevalo, de l’ethnie Shipibo-conibo, près de Yarinacocha (Pérou). Avec lui, j’ai diété le Piñon colorado (voir article sur les plantes de diète). J’ai reçu un de mes plus beaux chants de guérison d’Anastasia, une curandera âgée très réputée dans la communauté, passée dans l’autre monde depuis. Les chants shipibo sont très particuliers et d’une beauté fantastique. Les chamans chantent pour le groupe mais viennent également chanter des chants spécifiques, ce qui créé des mélanges très fascinants. Je suis malheureusement incapable de reproduire ces chants.

Juan Flores Salazar et son apprenti Brunswick

J’ai rencontré le maestro Juan Flores Salazar à Mayantuyacu en 2013 également (ethnie Ashaninca), au Pérou également. Lors de ce premier séjour dans ce magnifique site, les Esprits m’avaient indiqué durant les premières 2 nuits de cérémonies, faites d’affilées, que j’étais chez moi et que je devais y passer une année. Je pris ces messages avec circonspection et quelle ne fût pas ma surprise lorsque le lendemain des cérémonies, Juan est venu me trouver pour m’informer qu’il me prenait comme apprentie.
En 2014, je suis restée 6 mois à son côté lors de toutes les cérémonies d’Ayahuasca, tandis qu’il me confiait dès le début de cet incroyable séjour la charge des purges de Tabac, la purification de la Maloca, ainsi que la préparation des bains de plantes. J’ai bien entendu été soumise des périodes intenses de régime strict, d’isolement complet en forêt (à 15 minutes de marche du centre), avec différentes plantes de diète, que nous allions récolter ensemble. Que ce soit chez Mateo ou chez Juan, les pratiques sont très introspectives et invitent à trouver les ressources nécessaires d’apprentissage directement auprès des Plantes et des Esprits. Le chaman supervise à distance ou lors des cérémonies. Il y a très peu d’échanges verbaux mais parfois Juan me donnait des instructions télépathiques (et si elles n’étaient pas suivies, alors seulement il venait me parler…ou plutôt me rappeler à l’ordre !).
A la fin de ce séjour, Juan m’a enjointe à donner régulièrement des cérémonies à mon retour chez moi. Honnêtement, vu les responsabilités inhérentes à ce genre de pratiques, je râlais systématiquement auprès des Esprits lors de ces premières cérémonies en solo…jusqu’au jour où les Esprits m’ont clairement fait savoir que quand on avait les capacités et puisque des personnes avaient besoin de ces soins, on se mettait au service sans discuter…!
Hormis les diètes d’Ayahuasca et de Tabac, j’ai reçu du maestro de nombreuses plante à diéter, sur des durées plus ou moins longues : le Came Renaco, le Chuchuwasi, le Tamamuri, le Chihuahuaco, le Chullachaci Caaspi, le Sinchi Caaspi, la Chacruna, la Bobinsana, le Chiric Sanango.
Par la suite, hors des séjours sur place, j’ai également diété l’Ayahuma, le Cacao et le Rapé. J’espère ne rien avoir oublié dans ma liste.

A côté de cela, concernant l’Amérique du Sud, j’ai également voyagé en Equateur et en Bolivie, où j’ai rencontré d’autres chamans et assisté à des pratiques différentes. Les pratiques andines diffèrent passablement de celles du bassin amazonien. Notamment parce que l’environnement est très différents et que les Plantes n’y sont pas les mêmes. J’ai pu assister à des divinations avec les feuilles de coca et me confronter aux sacrifices animaux pour obtenir la faveur des Esprits, rencontrer la puissance des Condors et des Esprits de hautes montagnes. Ceci est une autre histoire.

la Pajé Waxi et son compagnon Wasaru

Lors d’un séjour plus récent au Brésil, chez la pajé Waxi de l’ethnie des Yawanawa, j’ai terminé mon initiation avec le Rapé et rencontré leur Uni (ayahuasca), le Kombo et d’autres pratiques de médecine. Les pratiques Yawanawa sont très différentes de celles que j’avais rencontrées jusqu’ici. Elles consistent beaucoup plus en des manifestations extériorisées, par des chants collectifs, des danses. Cela ressemble plus à une célébration festive de la tribu. Les Médecines sont également prises dans le quotidien sans autre forme de cérémonie. Cette initiation chez Waxi me permet d’amener dans mes cérémonies un aspect plus léger et joyeux, que j’utilise dorénavant en clôture. La joie et la légèreté sont également des belles médecines, très complémentaires à l’austérité shipibo 😉
A côté des ça, les Paje suivent bien entendu un apprentissage assez rude et certainement plus strict – aspects que je n’ai pas expérimentés.